Allgaier Porsche AP 312 Le « tracteur du café »
L’originalité et la rareté du tracteur Allgaier-Porsche AP 312 en ont fait un « éléphant blanc » que les amateurs de la marque recherchent activement à travers le monde. Etonnant à plus d’un titre, par sa ligne ou sa technique, il marque sans nul doute la production des deux constructeurs, Allgaier et Porsche, restant un cas original et très isolé dans la fabrication d’engins agricoles. Texte : Gilles Blanchet - Photos : DR et Porsche archives
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En 1946, quand un industriel brésilien visite l’usine Porsche à la recherche d’un tracteur à essence d’un type particulier, Ferdinand Porsche écoute ce visiteur avec beaucoup d’intérêt et envoie un ingénieur autrichien, Emil Rupilius, avec le tracteur P 312 à Sao Paulo. Il s’agissait d’un modèle étroit, caréné, doté d'un moteur à deux cylindres de 1 700 cm3 et 20 ch de puissance. Les planteurs de café craignaient en effet que les émanations des moteurs diesel ne nuisent à la qualité des fèves. La ligne "aérodynamique" avec roues carénées rappelle les silhouettes des locomotives américaines des années trente. La notion d’esthétique compte peu face à la protection des arbres et... du chauffeur. Le capot rabattable en arrière laisse un accès facile aux organes mécaniques et le phare central accentue l’originalité du tracteur. A cause d’un manque de pétrole au Brésil, les prototypes sont ensuite modifiés pour fonctionner au gaz ou à l’éthanol.
Un exemplaire restauré dans les règles. La rareté du tracteur mérite largement le travail effectué.
Essai de l’AP 312 sur un terrain arboré. La marque Allgaier apparaît lisiblement sur la carrosserie, le nom Porsche est plus discret.
En 1950 et 1951, les véhicules de démonstration retournent en Allemagne. L’accord de licence, qui prévoyait une production sur place, n’aboutît jamais. En 1952, une commande fut cependant passée sur la base du tracteur de plantation type 312 à moteur 4 temps et deux cylindres verticaux. L’ingénieur Rupilius devait établir les contacts et les relations nécessaires. En tant que technicien, il devait se mettre à la disposition des institutions d’Etat. En plus, il avait pour mission de travailler sur les coûts de l’implantation d’une unité de fabrication et de finition au Brésil.
Huit modèles d’AP 312 attendent l’embarquement dans une gare allemande.
L'un des premiers exemplaires avec capot ajouré testé au Brésil en 1954.
Malgré beaucoup d’avantages offerts par le « tracteur du café », la société n’a jamais réussi à mettre en place la fabrication en série d’un tracteur pour les plantations. Durant l’été 1952, les premières livraisons de tracteurs à essence destinées aux plantations de café furent effectuées. Les préparations de sols pour ces productions nécessitaient l’usage impératif d’une fraise. Arrivés en caisse dans le port de Santos (état de Sao Paulo), les tracteurs étaient pris en charge par les ingénieurs Heinz Altenberg et Fritz Attinger. Une commande d’au moins 1000 exemplaires avec fraise rotative était alors envisagée par un partenaire économique brésilien. Pour les travaux à la fraise en terrains difficiles, la mécanique de 25 ch semblait trop faible et fut augmentée à 30 ch par une modification de l’alésage et l'optimisation du refroidissement. En 1953, les représentants de la firme Alrico à Rio de Janeiro passèrent une commande de 1000 exemplaires du type 312. En mars 1954, deux envois de 75 exemplaires avaient rejoint le Brésil.
Un modèle avec sa fraise. L'ensemble a été restauré en Angleterre.
Malgré des retours positifs, il n’y eut jamais d'accord de licence. Les tracteurs restèrent longtemps bloqués en douane, ne furent jamais payés et, fin 1954, Porsche-Allgaier mit ses activités brésiliennes en sommeil. Vingt autres exemplaires furent dirigés vers l’Argentine et la Colombie.
On estime en 2015 que sept exemplaires de l’AP 312 ont été sauvés dans le monde. Trois seraient préservés en Allemagne dont l’un deux prêté de temps en temps au Musée Porsche. Un modèle a récemment retrouvé les rives du Lac de Constance, un autre a vu sa carrosserie entièrement restaurée par Body Concept Karosserie. Un exemplaire est préservé dans le sud de la France. Un autre vient de quitter la Grande-Bretagne pour rejoindre la collection d’un "porschiste" à Hong Kong et bien sûr, d’autres exemplaires restent à dénicher en Amérique du Sud !
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